- Le conteur content

Bonjour ou bonsoir, c'est souvent comme cela que commencent les histoires.
Je m'appelle Azerro, et je suis un conteur, le conteur Azerro.
Azerro aurait pu s'épeler A Z E 2R O, mais deux zéros ça fait déjà un en trop,ce n'est pas beau.
Donc Azerro s'épelle A Z E R RO, car s'il faut choisir, héros c'est mieux que deux zéros.
Comme quoi, il faut se méfier de la prononciation et des mauvaises liaisons, comme en amour où il y a des liaisons dangereuses et d'autres à ne pas faire.
Je m'en suis rendu compte un jour où en empruntant la voiture de mon amie elle m'avait dit :
- Hé ! C'est pas ta caisse. Heureusement que tu es mon N'Azerro.
Naze héros ?!!! Moi ?!!! Un naze héros ?
J'avais pensé : "Surtout ne te prononce pas, ne t'embrouille pas avec elle pour des histoires de N prononcé ou de H aspiré ! Reste muet, n'en tiens pas compte, en tant que conteur tu sais bien qu'elle exgégère !"
D'ailleurs aujourd'hui, si je suis un conteur, et même un conteur content, c'est justement parce qu'avant de l'être j'étais un type sans histoire, quelqu'un que l'on disait affable. Pourtant j'avais des problèmes avec les filles, car même si j'essayais d'être à la page, il n'y en avait pas souvent une sous ma couverture.
Un jour j'ai rencontré un ami qui m'a dit :
- Il faut que tu te livres ! Tu devrais écrire.
- Hé dis, t'es dingue ! Ecrire quoi ?
- Je ne sais pas moi, d' la poésie.
- D'la poésie ? Comment ça marche ?
- Avec les pieds, les pieds que tu mets dans les vers pour faire des vers à pieds.
- A quoi ça rime ?
- A prendre ton pied et à offrir des vers aux gens. Après tu deviens libre et ris !
- Mais dans ce cas tu es attaché à celui qui te lit.
- Oui, comme à ceux qui t'écoutent, oui, oui.
- Donc quand tu écris de la poésie tu dois rendre des comptes.
- Oui, quand tu écris tout le monde doit y trouver son compte. La poésie doit être "contable" !
- Ah ! Mais comment faire ?
Il m'a dit :
- Il y a quatre principes de base. Premièrement commencer par mesurer l'émoi. Deuxièmement savoir que la page blanche ça fait pâlir. Mais, troisièmement, être conscient que si tu écris ta page ça risque de faire du bruit. Et quatrièmement frapper fort pour que celui qui t'as lu percute.
- Mais ça marche toujours ou c'est une méthode un peu controversée ?
- Cela marche toujours, c'est comme ça qu'on fait les contes habilités pour que la poésie devienne contable.
J'étais loin du conte.
- Mais comment savoir si le conte est stable ? 
- Il y a quatre principes de base. Savoir ce que le conte recense. Retourner à la source pour voir le conte nu. Sans arrêt vérifier ses contes, car le véritable conte est le conte refait. Et se rendre compte qu'entre le conte rendu et le conte revenant il y a toujours le conte repétri.
Ce type m'avait fait comprendre que le français est une langue con plaisante. D'ailleurs c'est avec elle qu'on plaisante.
Grâce à lui j'ai commencé à m'éditer avant d'écrire.
J'ai rassemblé quelques idées que les mots lièrent et intitulé ça "Guide des mots passants".
Et puis après vers les cimes non identifiées de quelques châteaux brillants où des robots marchaient, c'est l'inattendu que mon âme isola.
Même si j'étais mal armé dans cet univers où gît de la difficulté, où ceux qui veulent taire leurs sentiments passent calamiteux et partent vers l'énigmatique eldorado des maisons d'édition, où l'écrivain vit en prenant de la coque tôt et remue ses souvenirs, puisant dans ses racines, comptant sur l'énergie de ses nerfs valeureux, tandis que l'éditeur compte sur lui, car l'éditeur compte, c'est l'éditeur qui fait les comptes. Les comptes de résultats, les comptes de dépôts, les "compte pas trop sur moi !", et ne paie jamais content mais paie à compte d'auteur après avoir demandé :
- Equilibre-t-on ?
Dans cette société où les droits ça s'aime, j'ai eu beau suer, on a répondu à mes effets verbaux "de l'air"!
Alors je suis parti avec le mistral vers ce clôt délicat que des rayons de soleil par-dessus les monts teignent.
Mes écrits n'étaient peut-être pas très prospères mais rimaient.
Ils montèrent lents jusqu'en haut du mât d'où s'apercevaient d'autres mâts rivaux, mais où j'étais sur le mât qui avait l'honneur de soutenir ce que les muses ont élu art.
Comme quoi il faut avoir du pot pour écrire des histoires extraordinaires et y trouver son conte !